En 1948, Ernest Ranglin devient professionnel en jouant pour les big bands locaux. Fin des années 50, il fallait revenir à de plus petits combos. Ernest Ranglin forme son quintet et fait le circuit des hôtels. A cette époque, le Rythm & Blues de la Nouvelle Orléans jouit d’une immense popularité en Jamaïque.
Les musiciens de l’île le jouent avec un swing particulier : le ska est né. Beaucoup de monde attribue la pérennité du ska à Ernest à travers le morceau « Shuffling Bug », « Je ne m’en souviens même plus, avoue-t-il. J’ai enregistré tellement de trucs à l’époque ». Une chose est sûre : le premier hit ska « My Boy Lollipop », de Millie Small, a été arrangé par Ernest Ranglin pour un tout petit label promis à de grandes choses : Island Records de Blackwell.
La légende est en marche. Elle ne s’arrêtera plus. De retour en Jamaïque et reprenant le circuit des clubs et des hôtels, jouant toutes sortes de musique à la demande, Ernest Ranglin travaille dans la journée pour Studio 1, où il détecte les talents et aide Coxsone, le patron, pour les arrangements. C’est là qu’il rencontre Bob Marley, qui aurait sollicité ardemment Ernest pour qu’il soit son guitariste permanent. Ernest décline l’offre : « je voulais me consacrer à ma propre carrière ».
Ernest Ranglin forme toutefois avec quelques camarades Les Skatalites, avec lesquels il joue à mi-temps. Tout début des années 70, Ernest arrive pour la première fois aux Etats-Unis, en tournée avec son compatriote Monty Alexander. Il restera dix ans en Floride :
« Là-bas, il suffisait que je mette une chemise calypso et je gagnais quatre fois plus ! A cette époque je me demandais parfois pourquoi je me creusais la tête à faire évoluer ma musique. »
Dans les années 90, Ernest Ranglin développe vraiment sa propre musique. Suivent des perles : « Below the Bass line« , « Memories of Barber Mack ». Mais une chose titille Ernest : les racines africaines : L’Afrique qu’il a visitée en tournée avec Jimmy Cliff : « Quand j’étais là-bas [il a visité l’Afrique lorsqu’il était en tournée avec Jimmy Cliff, NDLR], à travers la kora et d’autres, j’ai découvert les instruments des origines. »
Son premier projet sur ce continent est un coup de maître : In Search of the Lost Riddim, enregistré au Sénégal avec Baaba Maal, Mansour Seck et consorts. L’aventure à Alextown confirme l’esthétique musicale d’Ernest Ranglin, celle de placer sa guitare si fluide et swinguante sur les canevas du groupe sud-africain.
« J’ai pris énormément de plaisir à jouer avec les African Jazz Pioneers. Leur musique a son identité propre. On n’est pas dans la dynamique de se copier les uns les autres. Vous savez, en Jamaïque il y a eu beaucoup d’ostracisme de la part de plein de gens, surtout des puissants vis-à-vis du reggae, avant qu’il ne devienne une musique mondialement connue. C’était la même chose en Afrique du Sud où les musiques locales étaient très mal perçues et souvent dévalorisées. »