Breezin, l’album qui fait entrer le guitariste dans la catégorie superstar. George Benson réinvente le morceau titre signé Bobby Womack, sublime le thème « Affirmation » de Jose Feliciano. Les arrangements de Claus Ogerman sont une merveille de légèreté pour un enregistrement placé sous le signe du groove. Un groove magnifié par la guitare enchantée du boss, entouré de Phil Upchurch, de Ronnie Foster. Un immense succès pour une session majoritairement instrumentale, à l’exception de « This Masquerade » où le soliste scatte en symbiose avec sa guitare.
Si Warner eut fort à faire pour arracher Benson à Creed Taylor (alors producteur chez CTI), elle n’eut pas à regretter les 400 000 dollars déboursés pour le signer en août 1975. Avant d’être débauché par la major, George Benson est guitariste de session pour CTI depuis déjà quelques années. Ses enregistrements pour le label vont marquer l’apogée du guitariste. Propulsé par la crème des musiciens, nimbé d’arrangements de cordes classieux, son jeu y atteint des sommets, gagnant en complexité tout en restant éminemment chantant.
George Benson Breezin
Sur le premier morceau enregistré pour cet album, le titre « Affirmation », la formation réalise que les multiples prises tuent toute spontanéité. Idem pour « Six to Four » de Phil Upchurch.
Le reste de l’album est donc enregistré live en une seule prise. Quatre des six morceaux sont soit une première prise, soit des morceaux faits en une seule et unique prise, comme « This Masquerade », « Breezin’ », le morceau de Ronny Foster « Lady », ou sur « So This Is Love ».
Jorge Dalto, est à l’origine d’une bonne part de l’énergie qui se dégage de l’album. Ses percussions donnent une atmosphère latine sous-jacente et maintiennent un rythme très coulant.
La somptueuse ballade chantée « This Masquerade » fait figure d’exception sur cet album où se retrouve le jazz mélodique et funky de la période CTI, doté des grooves moelleux mitonnés par Upchurch (guitare), Harvey Mason (batterie), Stanley Banks (basse), Claus Ogerman (arrangements), Ronnie Foster et Jorge Dalto s’associant aux claviers avec des résultats miraculeux.
Pour l’anecdote, le producteur Tommy Lipuma lui avait suggéré une ballade d’un certain Leon Russell qui marqua si peu Benson qu’il en égara la cassette. Insistant, Lipuma lui en renvoya une copie qu’il écoutait lorsque Jorge Dalto, le pianiste de son groupe, fit irruption à son domicile en compagnie de sa femme. Cette dernière tomba en arrêt : « Oh, c’est ma chanson préférée, la chanson de Leon Russell ! ».
Benson se décida à l’apprendre… L’histoire, pourtant, semblait balbutier : l’enregistrement des titres instrumentaux se déroulait si bien que Lipuma n’était plus sûr de la nécessité d’un morceau chanté… «Allons, tu m’as obligé à l’apprendre, essayons-la une fois », rectifia Benson. Une prise suffit. Intro scattée voix/guitare, technique dont il usait en concert mais jamais en studio, puis l’entrée d’une voix de ténor magistrale, aux inflexions soul proches d’un Donny Hathaway, enluminée par les traits de velours de sa guitare et les arrangements soyeux de Claus Ogerman.
Benson semble pouvoir jouer des heures durant sans épuiser son swing (ce jeu en octaves sur le morceau bonus Shark Bitel) ou ses idées, comme sur le morceau titre solaire, composé par Bobby Womack et Gabor Szabo (non crédité).
Pour l’anecdote, Georges Benson aurait piqué à ce dernier les arrangements de « Breezin ».
Exception faite de This Masquerade, le jazz instrumental funky et léché de « Breezin » ne constitue pas une rupture si radicale avec l’esthétique des disques CTI, mais les albums suivants (« In Flight », « Weekend in L.A. » et « Living Inside Your Love ») vont résolument mettre l’accent sur la voix de Benson.
Personne n’était assez fou pour sortir une guitare à proximité de Wes Montgomery, man ! Mais il aimait mon jeu. Un magazine l’avait soumis à un blindfold test un jour, et lui avait passé un des mes titres, avec le saxophoniste Ronnie Cuber [il chante le thème de Ready and Able, sur “The George Benson Cookbook”]. « Oh c’est ce nouveau gamin, George Benson. J’aime ce son avec le sax baryton et la guitare. Le jour ou il va se décider à ralentir, ce sera un monstre ». Il trouvait que mon jeu était nerveux. « Détends-toi », me répétait-il. Et c’est ce que j’ai fait dix ans plus tard, sur “Breezin’”. C’est pourquoi l’album a eu du succès. Phil Upchurch, qui joue sur l’album et qui est lui-même excellent guitariste, m’a dit des années plus tard : « Man, quand on a fait “Breezin’”, je pensais que tu allais dévaler ça à la vitesse de la lumière ». Mais je m’étais souvenu de ce que Wes avait dit. Dix millions de disques vendus. Si j’avais écouté Wes plus tôt, j’aurais été une grande star bien avant… (George Benson)
This Masquerade récolta un Grammy Award et ouvrit la voie au succès de l’album “Breezin’”, premier album de jazz à devenir triple disque de platine (plus de trois millions d’exemplaires vendus). La carrière de George Benson venait de changer de dimension et son triomphe ne faisait que commencer.
Source : www.allmusic.com – https://smoothjazztherapy.typepad.com
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CREDITS :
Enregistré les 6, 7 & 8 janvier 1976 au Capitol Records Studios, Hollywood, California – USA – Warner Bros.
Arrangeur : Claus Ogerman – Direction artistique : Ed Thrasher, Lockart* – Basse : Stanley Banks – Clavinet, Piano : Jorge Dalto – Batterie : Harvey Mason – Piano électrique, Synthesizer [Mini-moog] : Ronnie Foster – Engineer [Assistant] : Don Henderson – Guitare solo, voix : George Benson – Mastering : Doug Sax – Percussion : Ralph MacDonald – Producer – Tommy Lipuma – Producer [Assistant] – Noel Newbolt – Recorded By, Mixed By – Al Schmitt – Guitare rythmique : Phil Upchurch