Bob Dylan est la figure la plus remarquable du revival musique folk. Mais c’est aussi la plus atypique. Dans son sillage, et dans son ombre, émergent des artistes au rayonnement plus ou moins éclatant.
Plus orthodoxe que son chef de file involontaire, emmenée par le succès de Joan Baez, Peter, Paul & Mary ou, plus tard, Simon & Garfunkel, cette génération contribue elle aussi à façonner le nouveau visage de la musique folk.
De Greenwich à Newport
Memphis, Nashville, Los Angeles ou San Francisco… Curieusement, il faut attendre la fin des années 1950 pour que New York réplique en abritant un style musical qui lui soit propre. La renaissance du folk prend ses quartiers dans Greenwich Village, la petite patrie des intellectuels et des artistes.
Rapidement, les clubs comme le Gerde’s Folk City, le Bitter End ou le Village Gate voient défiler tout ce que l’Amérique compte de jeunes artistes folks en devenir. Le poste avancé est régulièrement approvisionné par les deux autres places fortes du Nord-Est, Boston et Chicago, et relayé, chaque année depuis 1959, par le festival de Newport, passage obligé de toutes les têtes de proue du mouvement.
La madone de la musique folk
Joan Baez y fait ses premiers pas cette année-là. L’invitée surprise de Bob Gibson gagne immédiatement le cœur du public. De ce jour, sa voix cristalline régnera sur un folk devenu incroyablement vendeur. Durant toute la première partie de sa carrière, la jeune femme d’origine irlando-mexicaine interprète les chansons que d’autres ont écrites : des ballades traditionnelles, d’abord, puis des titres de ses contemporains, comme son bien-aimé Dylan.
Adorée du grand public, aux États-Unis comme en Europe, elle est en outre l’une des représentantes les plus ferventes de la vision politique portée par le folk. Profondément engagée, adepte de l’action non violente, elle s’impose comme une figure de la contestation. Manifestations contre la guerre du Viêtnam, marches pour les droits civiques, lutte antimilitariste… elle est emprisonnée à plusieurs reprises, tout comme son époux, le militant pacifiste David Harris.
A la fin des années 1960, elle élargit son répertoire, portant son intérêt sur des textes plus lyriques, ou mettant en musique des poètes classiques. Plus tard, elle commence à écrire ses propres compositions.
Responsable de l’émergence de nombreux artistes folks, elle ne reniera jamais la portée sociale et politique de son activité artistique. Sa sincérité constitue aujourd’hui encore la meilleure réponse à ses détracteurs – on a souvent critiqué la dimension spectaculaire de son action, ainsi que son apparente naïveté.
Les héritiers directs et la relève
La descendance du fils indigne du folk et de sa madone est nombreuse. Tom Paxton, révélé à Newport en 1964, se situe dans la droite ligne de l’école de Guthrie. De la même manière, Phil Ochs à peu près inconnu en France – complétera a lignée d’une chanson militante. Tous deux pourtant, suivant l’inflexion naturelle désormais caractéristique du genre, se tourneront, à la fin des années 1960, vers une écriture moins directe et des orchestrations plus sophistiquées.
Dans leur sillage, des artistes comme Judy Collins, Arlo Guthrie (le fils cadet de son père, né en 1947), Eric Andersen ou Fred Neil feront eux aussi le tour du méridien Greenwich-Newport, et les beaux jours de Broadside, la revue spécialisée du moment. La fusion progressive des styles musicaux opérée au cours de ces années permettra en outre à des personnalités comme le Canadien Neil Young – digne second de Dylan en matière d’aventurisme stylistique comme d’écriture – d’exploser au début de la décennie suivante.
Du même côté de la frontière, Joni Mitchell (quoique bientôt émigrée en Californie) complétera la lignée des chanteuses folks et Léonard Cohen contribuera à installer les canons d’un « singing-songwriting’ virtuose.
Au Royaume-Uni enfin, et outre l’influence considérable de Dylan sur les « envahisseurs », Beatles et Rolling Stones en premier lieu, le revival folk donnera d’abord naissance à un rejeton tout dévoué à la cause, Donovan. Avant de permettre l’émergence d’artistes aussi irremplaçables que Nick Drake ou, plus près de nous, Billy Bragg.
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