Tom Zé c’est tout à la fois le fils de Marcel Duchamp et de Man Ray, le petit frère de Boby Lapointe, le père d’Albert Marcoeur (musizinzin français de la fin des seventies), grand-père de Beck et camarade de régiment « tropicaliste » de ses compatriotes Caetano Veloso, Gilberto Gil et Gal Costa, toutes filiations spirituelles, très spirituelles.
Tom Zé leur ressemble un peu, mais en même temps, il ne ressemble à rien ni à personne. Par nature, il va à contre courant, quand, dans les années 60, la télévision brésilienne lui propose d’emprunter le « Tremplin pour le succès ». Pour cette émission, il crée la chanson « Escalier pour la défaite ». Le reste est à l’avenant.
Quand ses camarades de jeux découvrent les voluptés des grands ensembles à cordes, Antonio José Santana Martins s’émeut à l’écoute d’une ponceuse à parquet, son qui se marie à merveille avec ses chansons engagées aux titres monosyllabiques.
Son goût pour les bruits étranges va jusqu’à lui faire bricoler un meuble-instrument où les touches sont remplacées par des sonnettes et les cordes par des mixeurs, des machines à écrire et autres ustensiles, que ses contemporains acceptent moins volontiers sur scène qu’au fond d’un garage.
Et c’est bien entre le cambouis et les roulements à billes de la station-service de son cousin que Tom Zé s’apprêtait à enterrer sa carrière quand, de guerre lasse, il faillit tout abandonner en 89.
Mais c’était sans compter sur le providentiel David Byrne (leader de Talking Heads) qui, découvrant par hasard un de ses anciens disques, en évalue l’étrange beauté et lui barre de justesse la porte du garage. Le patron de Luaka Bop récupère les anciens enregistrements du Zébulon brésilien et relance sa carrière. Un best of sort en 1990 et un nouvel album, » Hips of tradition « , en 1992, tous deux épuisés aujourd’hui.
Cette année, Tom Zé nous invite à déguster le goûteux « Com defeito de fabricaçao » où Tom Zé, au moment du trou normand, développe sa théorie de « l’esthétique du plagiat » véritable profession de foi d’un zénial brocanteur de sons. Et toute sa famille retrouvée se lève pour applaudir.
Ses petits enfants, Sean Lennon, Tortoise et Stereolab en tête, lui ont préparé un album de remixes, histoire de bien commencer la dernière année du millénaire.
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